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vendredi 23 octobre 2015

Equitation et sexisme

... et beaucoup d'éléments en "isme", aussi : spécisme, kantisme, extrémisme...  Bon, c'était quoi le titre ? Le sexisme, d'accord. C'est parti!
Donc. L'équitation a une longue tradition sexiste. 
Depuis toute petite, j'entends des conneries sur les cavalières "trop chochottes", "trop sentimentales", de la part de certains gros lourds qui sont persuadés qu'en maltraitant leur entier, ils prouveront que ce sont des hommes, des vrais, estiment normal de mater les fesses des clientes ou de les traiter en "proies" (je reste vague, exprès, vous noterez), avec vannes débiles et rapports de force ad nauseam en plus.
Et je ne vous parle même pas des "vrais cavaliers", forcément des hommes, etc. etc. (JPD, cf. suite du billet ci-dessous, n'a rien inventé en la matière, il se contente de reprendre des discours discriminatoires et de leur donner une vague teinte scientifique)

Alors : suite au scandale de l'abattoir d'Alès (je ne vous montre pas la vidéo, vous êtes grands, vous tapez "vidéo abattoir Alès" sur google et vous avez tout ce qu'il vous faut), j'ai eu connaissance de plusieurs rapports de chercheurs - Jean-Pierre Digart et sa disciple Catherine Tourre-Malen, qui m'ont d'abord mise en colère, avant de me faire marrer...
A en croire le premier, quand l'amour (féminin) remplace le respect (masculin), tout va mal. Vision bien kantienne et bien limitée, vous me l'accorderez... Car il ne peut y avoir amour sans respect, sinon, c'est du désir (dans le meilleur des cas) ou de l'envie (beurk).
(Dites, je peux faire une digression, là ? Oui ? ben je trouve qu'il a une conception de l'amour qui fait froid dans le dos, moi. Ça pue le pervers narcissique, non ? )
 Pour la seconde, la féminisation de l'équitation et l'incitation au maternage du cheval, "ce bel indifférent" (la disciple du monsieur a été monitrice, ce qui est censé lui conférer une espèce de légitimité en la matière...) et mènera à terme à la disparition de l'équitation et des équidés, rien que ça.

Au passage, le premier regrette la "sous-utilisation du cheval" en équitation de loisir (en parcourant son papier, j'ai eu l'impression de revenir 20 ans en arrière, avant le développement du tourisme équestre, avec d'un côté les "vrais" cavaliers et de l'autre les "couillons" qui se font trimballer de chemin en plage sur leurs monture... ) 
(un jour, monsieur JPD,,quand je serai riche et célèbre, je vous offrirai une rando à cheval. Je vous offrirai aussi les œuvres complètes de Vinciane Desprets( ici) )

... et les réactions des associations, magazines et autres qui s'insurgent contre les abus à l'encontre des chevaux de sport. Vive les barres fixes et le rollkür, hein ?  Ah au fait...

Sans grâce, il n'y a pas d'équitation fine, et sans finesse, on ne peut pas songer à l'Art. La dureté, la force, c'est l'apanage des médiocres, qui ne sauraient jamais être vrais. 
Nuno Oliveira*. 
Oups, hein ?
L'autre regrette que les cavalières en soient réduites à materner leurs montures avec le temps passé à les panser et la recherche du plaisir et de la sécurité avant tout (Monitrice, vraiment ? Il y a 30 ans peut-être...) Autant pour mes amis cavaliERS, qui aiment passer du temps à brosser et gratouiller leurs chevaux. Bref. Je ne suis pas là pour paraphraser tout ça, d'autant que vous êtes grands, vous pouvez lire si ça vous chante, mais pour poser une autre question... *


Pourquoi, au lieu de s'attaquer aux femmes, ne pas s'interroger sur les dérives du genre ? 
Je vous explique : la relation homme-cheval ou femme-cheval, l'aspect fusionnel, passionnel, dévorant, existe, a toujours existé n'en déplaise à nos deux  spécistes. Bucéphale et Alexandre. Euclides et Nuno Oliveira. Bartabas (à qui on ne saurait reprocher d'être gnangnan) et Zingaro. oui ce ne sont que des mâles, mais c'est exprès. Des fois qu'on me traite de sentimentale cucul...
L'équitation respectueuse des chevaux, où sont privilégiées l'harmonie du couple cavalier-cheval (c'est la base quand même...) et le respect (pas de respect sans amour...) est une véritable avancée. 
Ce qui est en revanche très pénible, c'est la genrisation des produits dérivés. Et c'est sur ce sujet qu'un travail anthropologique pourrait être effectué - et serait autrement plus pertinent que des pamphlets condescendants et contradictoires sur la "nouvelle "équitation. Mais plus dangereux, aussi. Plus dangereux, parce qu'il mettrait certainement en cause un immense pan de l'économie moderne qui justement s'appuie sur le genre pour exister.



Cure-pieds à paillettes (perso, j'adore). Licols multicolores (éthologiques ou pas). Brosses de massage (Assarabe vous dit merci). Tapis de selle et bombe assorties. Littérature... à l'eau de rose. Là, ça me fait un peu moins kiffer tout de suite, mais on rentre véritablement dans le vif du sujet. Pour une vraie fan de littérature équestre, ça pique les yeux quand les trois-quarts des romans sur les chevaux se réduisent à du crêpage de chignon sur fond de compétition de CSO. Mais au lieu d'incriminer les lectrices ou les filles, peut-être faut-il se poser la question du marketing, non ? Entre nous, la différence entre un cure-pieds noir et un cure-pied rose, c'est quoi ? Quelques centimes d'euro en plus côté "fille", comme pour les stylos Bic "Crystal"! Pourquoi les maisons d'édition, et j'en sais quelque chose, s'acharnent-elles à produire en série - surtout au moment des fêtes - des livres rose et strass pour les filles, des livres bleus et pirates pour les garçons, des princesses à poney d'un côté, des cavaliers des steppes de l'autre ? 



Ainsi, si l'équitation est en majorité féminine (cf. chiffres de licencié(e)es FFE), elle est également toujours aussi sexiste. Sexiste, pour toutes les raisons susmentionnées. Tradition sportive machiste. Discours méprisants et haineux.Matraquage marketing indécent (grâce auquel, rassurez-vous madame la scientifique, les équidés ont encore de beaux jours devant eux... tant qu'il y a du rose, il y a de l'espoir). 
Sexiste, également, pour une dernière raison, peut-être. Je ne m'y connais pas très bien en sport, mais vachement plus en art. Depuis 2010 - et je ne remercierai jamais assez Paola Grieco de m'avoir mise sur les rails - et Précieuses, pas ridicules! , je m'intéresse aux femmes artistes, et plus précisément, à la façon dont elles ont été et sont encore minorées et/ou exclues. Des peintres "académiques (bah, caca)" aux compositrices oubliées, en passant par les autrices "mineures", les femmes-ont été largement occultées dans l'histoire des arts... une femme est à pour accoucher, interpréter, mais pas créer, vous comprenez. 
"On a tendance, de nos jours, à oublier que l'équitation est un art, écrivait Nuno Oliveira,. Or, l'art n'existe pas sans amour." Je me demande s'il n'y a pas là, dans cette notion d'art, une explication supplémentaire au sexisme qui règne dans le monde du cheval... 

Sur ce, je vous laisse. J'ai un nouveau cure-pied rose bonbnon à tester. 

* Nuno Oliveira est le plus grand maître équestre du XXème siècle

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